L'ennemi juif by Jeffrey Herf

Auteur:Jeffrey Herf [Jeffrey Herf]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782702145074
Éditeur: Calmann-Lévy
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Le Bureau de la Presse du Reich accompagna ces instructions du Service des Périodiques de nouvelles directives antisémites. « Quand le Juif est au pouvoir » faisait fi de la distinction opérée par Roosevelt et Churchill dans la déclaration de Casablanca entre le régime nazi et le peuple allemand. Affermir la résistance allemande supposait de faire ressortir les conséquences du pouvoir juif. Plus les Allemands croiraient que la « juiverie avait la ferme intention de les exterminer tous » et comprendraient que la guerre, comme Hitler l’avait dernièrement affirmé, ne laisserait que « les survivants et les exterminés », plus le soutien de la population à la guerre croîtrait587. La « déclaration de guerre » de la juiverie aux « peuples européens » avait conduit les nazis à prendre des « mesures énergiques » contre les Juifs. Ordre était donné aux périodiques de décrire les mesures contre les Juifs comme des mesures d’« autodéfense588 ».

En janvier 1943, l’intensification de la campagne de presse contre les Juifs était patente. Le 14 janvier, Die Völkische Beobachter titra : « Ils n’échapperont pas au châtiment de leur bellicisme : les Juifs des États-Unis doivent compter sur une vague d’intolérance » ; puis, le 16 : « Rosenman se tient derrière Roosevelt : un archi-Juif sur le trône des États-Unis. » Roosevelt y était qualifié d’« instrument de la haute finance juive589 ». Les Juifs, écrivait le Völkische Beobachter, sortaient des coulisses pour révéler que les « hommes de paille non juifs sur la scène politique et économique ne dansaient qu’au gré des manipulations des Juifs ». Une victoire américaine signifierait la « victoire des plans juifs de domination mondiale. […] Rosenman parle à travers Roosevelt ; la juiverie mondiale parle à travers le président américain ». Le 7 février 1943, le Völkische Beobachter titra : « Wallace révèle le rêve d’avenir de Roosevelt. Le monde entier sera un champ livré aux exploiteurs juifs américains. Ceux qui n’obéissent pas aux ordres seront impitoyablement bombardés. » La proposition de Wallace d’étendre les vols commerciaux à travers le monde après la guerre était une preuve de plus qui trahissait les « plans de domination et d’exploitation du monde de l’impérialisme judéo-américain à la Roosevelt590 ».

Hitler fut la force motrice de l’amplification de la campagne de propagande contre les Juifs. Dans un long discours aux dirigeants du gouvernement et du parti réunis à son QG de Prusse orientale, le 8 février 1943, il brossa un tableau de la guerre. Il signala l’ampleur des pertes de l’Union soviétique et les sérieuses différences existant entre les États-Unis et l’Angleterre. D’après les notes figurant dans le Journal de Goebbels, Hitler expliqua : « L’ennemi avait l’avantage d’être uni par la juiverie internationale. La juiverie est l’élément moteur de tous les États ennemis. Nous n’avons rien de comparable. » Aussi ne faut-il pas seulement chasser la juiverie d’Allemagne, mais « l’éliminer de toute l’Europe591 ». Le message de Hitler aux dirigeants était sombre. Ou l’Allemagne dominerait l’Europe, ou elle connaîtrait « liquidation et extermination ».

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